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FMAT 2016. Atelier 5
Date de rédaction :
Organismes : Forum Mondial sur l’Accès à la Terre (FMAT)
Type de document : Document de travail
Forum Mondial sur l’Accès à la Terre - FMAT 2016. Actes. 266 pages
Synthèse provisoire présentée en plénière le 1 avril. Rapporteur: GATUNDU, Catherine, ActionAid, Kenya
En ouverture, les participants ont rendu hommage à Berta Caceres, militante écologique et de la défense des peuples indigènes, assassinée à La Esperanza (Honduras), le 3 mars 2016.
Bilan
Partout dans le monde, l’immense majorité des femmes fait face à des conditions d’accès et de contrôle de la terre et des ressources naturelles inégales à celles des hommes.
Les rapports sociaux ont banalisé le fait qu’elles soient intégralement en charge du travail domestique et de l’éducation des enfants, charges qui les empêchent de se consacrer autant que les hommes aux activités agricoles. Dans les champs, elles sont les travailleuses obligées de la famille et assument les tâches souvent les moins valorisées, considérées comme un pan de leurs obligations domestiques. Elles n’en retirent donc généralement aucun revenu. Les règles coutumières de l’héritage perpétuent souvent l’inégalité. Dans certaines régions de Madagascar, par exemple, les femmes n’ont aucun droit sur l’héritage de leur père ou de leur mari. Dans les communautés indigènes et autochtones, l’héritage est souvent l’affaire des “anciens”, le plus souvent des hommes. L’exclusion des femmes de l’héritage des terres est parfois aussi prônée au nom de conceptions religieuses.
Les institutions nationales reflètent ces structures patriarcales. De nombreux États renoncent à assurer l’égalité et l’inclusion sociale des femmes et continuent d’accorder une place secondaire aux problématiques de genre. Dans certains pays, il n’existe pas de données sur les femmes dans le domaine agricole, celles-ci ne portant que sur les familles et propriétés familiales. Les textes légaux concernant l’environnement et le développement ne considèrent pas toujours clairement le rôle des femmes. Généralement, elles ne bénéficient pas du statut d’agricultrices et ont moins accès aux crédits et équipements agricoles.
Très souvent, les femmes n’ont pas de droit reconnu sur la terre. En Inde, seulement 12% des femmes sont propriétaires de leurs terres. La propriété ne leur est accessible qu’après la mort du mari. Lorsqu’elle est reconnue à leur communauté, la propriété collective est souvent la seule garantie d’un certain accès aux ressources. Elles sont donc les plus grandes victimes de la disparition de cette forme de propriété. Si un droit individuel à la terre et aux ressources naturelles leur est reconnu par la loi, elles ne sont généralement pas en mesure de supporter le coût des procédures administratives nécessaires à sa concrétisation (opérations cadastrales, titrisation…). De la même manière, elles n’ont que rarement les moyens de valoriser pleinement leurs terres.
Les mécanismes de marché qui s’appliquent aux droits fonciers, au travail, aux moyens de production et au crédit sont inefficaces pour assurer aux femmes un accès et un pouvoir de contrôle véritable sur les terres et les ressources naturelles. Elles sont minoritaires dans les organismes de représentation, au sein des organisations de la société civile et des processus décisionnels locaux, nationaux et internationaux. Ce que plusieurs panels du FMAT ont malheureusement reflété. Les postes de direction sont encore trop souvent entre les mains des hommes, ce qui compromet l’évolution de la condition des femmes.
Dans le contexte actuel d’accaparement et concentration des terres et ressources naturelles par de moins en moins d’individus et entreprises, et d’éviction de la majorité des ruraux, les femmes sont ainsi doublement pénalisées. Le chemin est encore loin vers la mise en œuvre pleine et effective de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’encontre des femmes (CEDAW), dont un des engagements spécifiques appelle à favoriser un accès et un contrôle des terres et autres moyens de production plus égalitaire pour les femmes. Engagement qui a été notamment réaffirmé dans les Objectifs de Développement Durable (ODD).
Une action politique forte en faveur des femmes est donc indispensable pour qu’elles puissent accéder aux ressources naturelles et les contrôler. L’accès à la terre et son contrôle par les femmes sont primordiaux pour leur émancipation, le bien-être des familles et, partant, pour la lutte contre la malnutrition et la pauvreté. Leur rôle dans le domaine agricole est essentiel. Elles assurent jusqu’à 70 % du travail dans l’agriculture familiale paysanne. Se faisant, elles sont les premières contributrices à la réalisation de la souveraineté et de la sécurité alimentaire.
Propositions
Les actions citoyennes doivent viser au renforcement des organisations de femmes, à la présence des femmes dans les organisations paysannes ainsi qu’à l’éducation des sociétés dans leur ensemble.
Renforcer les mouvements de femmes et leur présence dans les organisations paysannes:
Promouvoir la formation juridique élémentaire des femmes afin qu’elles aient connaissance des textes juridiques existants les concernant, tels que la CEDAW,
Leur assurer une représentation équitable dans les organisations paysannes et dans les luttes contre les accaparements des terres, pour veiller à ne pas reproduire les structures patriarcales,
Renforcer les organisations de femmes existantes et soutenir la création de nouvelles là où la défense de leurs intérêts n’est pas organisée. Former des espaces de fédération au niveau national et international afin de faire entendre la voix commune des femmes rurales. Il a été proposé de s’appuyer sur les exemples de mouvements et d’actions de femmes présentés durant l’atelier tels que le réseau MAKAAM11 en Inde ou les marches des Marguerites organisées par la CONTAG12 au Brésil, lesquelles ont notamment permis que plus de 70% des terres de ce pays soient aujourd’hui en copropriété homme-femme.
Éduquer les sociétés:
Sensibiliser sur toutes les formes violences faites aux femmes,
Mesurer le travail “invisible” des femmes et le faire valoir au niveau communautaire et gouvernemental,
Mettre en évidence leur potentiel majeur de contribution à la lutte contre l’accaparement des terres, à l’essor de l’agroécologie et ainsi à la lutte contre la pauvreté, la mal et sous nutrition et le changement climatique.
Les revendications politiques portées par ces mouvements doivent viser l’adoption par les États des mesures politiques suivantes:
La protection des femmes contre les violences communautaires et institutionnelles,
La pleine participation des femmes aux institutions gouvernementales, nationales et locales et aux prises de décisions,
La mise en œuvre et la protection des droits des femmes notamment stipulés dans la CEDAW et notamment leur accès sécurisé à la terre et aux ressources naturelles et autres moyens de production et leur droit à contrôler l’utilisation qu’elles en font, ou encore la reconnaissance du statut d’agricultrices,
L’accès des femmes aux crédits, subventions et allégements fiscaux afin de rendre possible et durable l’activité agricole des femmes.
L’obligation de faire figurer le nom des femmes sur les documents matérialisant les droits fonciers (propriété, usage),
La reconnaissance du travail agricole réalisé par les femmes.
Interventions
La liste suivante n’est pas exhaustive. Nous nous excusons auprès des intervenants lors de cet atelier et des participants qui n’y trouvent pas leur nom, et vous invitons à vous manifester, à l’adresse suivante, pour nous permettre d’éditer une nouvelle version de cette synthèse avec la liste complète: secretariat@landaccessforum.org
Interventions introductives:
BORQUEZ, Rita, PROCASUR, Chili
ECHEVARRIA LEON, Dayma, Centre d’Études de l’Économie Cubaine, Cuba
EL HADJI FAYE, Environnement et Développement du Tiers Monde, Protection naturelle des cultures (ENDA PRONAT), Sénégal
LUNAS COSTA, Alessandra, Confédération Nationale des Travailleurs Agricoles (Confederação Nacional dos Trabalhadores na Agricultura), Brésil
NITYA, Rao, École de Développement International, Université d’Est-Anglie, Royaume Uni
RAVONIARISOA, Lilia, Federasiona ny Vehivavy Tantsaha eto Madagasikara, Madagascar
Interventions des participants:
ANGULO GUTIERREZ, Elga Betty, Confédération paysanne (Confederación Campesina) Pérou
BEL MOKTHAR, Siham, Agronome, Cabinet du Ministre, Cellule des Affaires Parlementaires, Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime, Maroc
GAMBOA BELTETON, Klemen Guadalupe, Organisation des Nations Unies pour l’Agriculture (FAO), Délégation Amérique latine, Guatemala,
HERNANDEZ, Veronica, Alliance des Organisations Forestières Communautaires (Alianza de Organizaciones Forestales Comunitarias), Guatemala
I MOBIN JINAH, Shah, directeur exécutif de l’Association pour le Développement Communautaire (Community Development Association, CDA, Bangladesh
MARTÍNEZ JIMENEZ, Florita, Réseau Indigène Bribri et Cabecar (Red Indígena Bribri y Cabecar, RIBCA), Costa Rica
NAÏT SID, Kamira, Présidente du Conseil Mondial Amazigh, Association Peuples des Montagnes du Monde, Algérie
Modérateur:
CASTILLO HUERTAS, Ana Patricia, Féministe agraire, Guatemala
Rapporteur:
GATUNDU, Catherine, ActionAid, Kenya
11 Réseau composé de 74 organisations de femmes agricultrices. Il a été constitué pour demander la mise en œuvre de leurs revendications: notamment la redistribution des terres aux femmes, l’enregistrement de leurs droits, l’égalité d’accès aux services, mais aussi la création de centres de ressources communautaires pour promouvoir la justice de genre, à savoir la possibilité pour les femmes de faire des choix libres basés sur des capacités et aspirations individuelles.
12 La dernière marche des Marguerites en date s’est déroulée en août 2015 et a réuni 70000 femmes.