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FMAT 2016. Atelier 4
Writing date:
Organizations: Forum Mondial sur l’Accès à la Terre (FMAT), Association pour contribuer à l’Amélioration de la Gouvernance de la Terre, de l’Eau et des Ressources naturelles (AGTER), Centro de Estudios Rurales y de Agricultura Internacional (CERAI)
Type of document: Work document
Forum Mondial sur l’Accès à la Terre - FMAT 2016. Actes. 266 pages
Synthèse provisoire présentée en plénière le 1 avril. Rapporteur: FAYE, Iba Mar, Sociologue, chef de mission “agriculture familiale et terre”, GRET, Sénégal
Constat
Le sort fait à l’agriculture familiale et le développement urbain sont étroitement liés.
Les facteurs de disparition de l’agriculture familiale
Ils sont multiples et interactifs:
Diminution des surfaces cultivables et des espaces pastoraux du fait des bouleversements climatiques ;
Accaparement des terres (de l’eau et des autres ressources naturelles) par les groupes agro-industriels ou miniers qui, outre leur impact foncier, provoquent des pollutions ;
Détournement des terres de leur vocation vivrière locale et affectation à des productions alimentaires destinées à l’exportation, à des productions d’agro carburants ou d’aliments pour le bétail des pays dits “développés” ;
Impossibilité pour les paysans d’accéder aux marchés locaux du fait de la perte de revenus et de l’éloignement des acheteurs ;
Libéralisation des échanges en faveur de l’agro-industrie occidentale (accord agricole de 1994, A.P.E., …) et de ses capacités à exporter dans les zones urbaines du nord et du sud, du fait de prix de revient nettement inférieurs.
L’exode
Au total, les populations rurales, largement paysannes, n’arrivent plus ni à tirer un revenu décent de leurs activités, ni à s’alimenter correctement. Chaque année, à l’échelle planétaire, 65 millions de personnes sortent de la paysannerie en état de très grande pauvreté!
Sur ces 65 millions, 20 millions seulement restent en zone rurale. Tous les ans, 45 millions d’anciens paysans viennent grossir les villes! Ils constituent là le premier flux responsable de la croissance démographique des métropoles (100 000 habitants de plus par an à Antananarivo)! Ils sont en état de très grande fragilité et non solvables, ils ne peuvent que nourrir les rangs des chômeurs et se concentrer dans les bidonvilles. Avant, pour certains, de tenter des migrations plus lointaines. Les États et les collectivités qui gèrent ces zones urbaines ont des difficultés considérables pour accueillir tout le monde, maîtriser les tensions et apporter les services nécessaires aux populations. Mais, États et collectivités doivent en premier lieu faire en sorte que celles-ci puissent se nourrir. Les formes même de l’urbanisation constituent souvent des entraves supplémentaires. Conclusion: Si on veut combattre l’hypertrophie urbaine, il faut s’attaquer aux sources même de la destruction de la paysannerie et de l’exode. Quand on pourra vivre dignement en secteur rural, aller en ville pourra résulter d’un vrai choix et non d’une obligation incontournable.
Propositions
L’atelier 4 a permis de dégager des propositions spécifiques concernant l’urbanisation ; nous les exposons ci-dessous. Elles reposent sur deux préalables:
La capacité des collectivités locales à remettre en cause leurs politiques actuelles d’aménagement ;
Celle des mouvements paysans et des mouvements sociaux urbains à s’allier, notamment pour porter l’exigence de souveraineté alimentaire.
Des politiques territoriales
Du niveau local au niveau planétaire (UN Habitat) il faut passer d’une démarche urbanistique qui n’organise que la croissance des villes à une démarche territoriale englobant les trois secteurs, urbain, périurbain et rural, et prenant en compte la fonction sociale de la terre dans toutes ses dimensions. Des projets d’aménagement territoriaux sont seuls capables de porter le refus de la consommation de terres agricoles et des espaces naturels, de poser correctement la nécessité d’un crédit non usurier aux paysans pauvres et de leur accès au marché. C’est dans ce cadre que, par exemple, certaines collectivités tentent des politiques de soutien à l’installation et à des productions vivrières garantissant à la fois le débouché aux producteurs et l’approvisionnement aux cuisines centrales assurant des services d’alimentation collective. On peut ainsi aller jusqu’à de véritables contrats de réciprocité entre métropoles urbaines et zones rurales. Il s’agit bien en fait de construire la souveraineté alimentaire à une échelle territoriale adaptée.
Préservation d’espaces vivriers en ville
Aujourd’hui, “construire la ville sur la ville” est devenu une formule passe- partout chez les urbanistes. C’est une formule qui énonce un vrai sujet: l’obligation, pour conserver le potentiel nourricier des territoires et pour ne pas rejeter les populations pauvres ou nouvelles à l’extérieur des centres urbains, de densifier l’habitat, les zones d’activités industrielles, etc. Il est possible de requalifier des zones pavillonnaires en les densifiant, de reconquérir certaines friches industrielles ou commerciales. Ces opérations coûtent cher, c’est l’argument utilisé par leurs détracteurs, mais le prix de revient réel de l’étalement urbain (investissement dans les réseaux, amortissement correspondant et frais de fonctionnement) est très peu étudié; et encore faudrait-il envisager les coûts environnementaux et sociaux de l’étalement, notamment son effet sur la spéculation foncière.
Les collectivités locales doivent mener des densifications intelligentes pour qu’elles soient acceptées: il ne s’agit pas de bâtir des tours partout, de supprimer les espaces dédiés aux déplacements doux, aux aires de jeux, à des jardins partagés ou à d’autres formes de fermes urbaines. La souveraineté alimentaire passe à la fois par la préservation d’une agriculture paysanne active et par des initiatives citoyennes non marchandes de production vivrière.
De nécessaires alliances
Combattre les situations locales d’accaparement des terres, défendre la paysannerie, construire la souveraineté alimentaire, densifier intelligemment, sont des nécessités mais, pour les collectivités locales et leurs élus, cela nécessite une lucidité et un courage politique qui ne sont pas spontanés. L’atelier 4 s’est conclu sur le besoin majeur, pour peser sur le droit comme sur la conduite des actions publiques locales pour traiter les facteurs de disparition de l’agriculture familiale et ses effets (Cf Bilan plus haut), de développer des alliances structurées et puissantes entre le mouvement paysan et l’ensemble des mouvements sociaux qui regroupent à la fois urbains et consommateurs.
Interventions
La liste suivante n’est pas exhaustive. Nous nous excusons auprès des intervenants lors de cet atelier et des participants qui n’y trouvent pas leur nom, et vous invitons à vous manifester, à l’adresse suivante, pour nous permettre d’éditer une nouvelle version de cette synthèse avec la liste complète: secretariat@landaccessforum.org
Interventions introductives:
CHARRIER, Maurice, président de l’Association Internationale de Développement Urbain (INTA), France
DJAOMAMY, Association pour le Développement de l’Agriculture et du Paysannat du Sanbirano, Madagascar
GBANFREIN, Paul, Responsable du projet Sécurisation des droits fonciers em zone urbaine, Centre de Recherche et d’Action pour la Paix (CERAP), Côte d’Ivoire
LALANDE, Christophe, chef du Département Logement de ONU-Habitat, France (par téléphone)
MARIANI, Maurizio, projet Eating Cities, président du Consortium Risteco, Italie
RAPARISON, Eric, coordinateur de la Plate-forme de Solidarité des Intervenants sur le Foncier (SIF), Madagascar,
ROUILLÉ D’ORFEUIL, Henri, Académie d’Agriculture, France
ZARATE, Lorena, Présidente de Habitat International Coalition (HIC), Mexique
Intervention de participants:
BECKH, Charlotte, Institut d’Études Avancées de la Durabilité (Institute for
Advanced Sustainability Studie, IASS), Allemagne
BUISSON, Michel, Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (ATTAC), France
COSTA MORAIS, María José, Confédération Nationale des Travailleurs Agricoles (Confederação Nacional dos Trabalhadores na Agricultura, CONTAG), Brésil
DA SILVA MATIAS, Willian Clementino, Confédération Nationale des Travailleurs Agricoles (Confederação Nacional dos Trabalhadores na Agricultura, CONTAG), Brésil
FRU NGANG Francis, Secrétaire Général de l’Institut Africain pour le développement Économique et Social (INADES Formation), Côte d’Ivoire
NASCIMENTO SILVA, Adriana Confédération Nationale des Travailleurs Agricoles (Confederação Nacional dos Trabalhadores na Agricultura, CONTAG), Brésil
WARTENA, Sjoerd, Fondateur et ancien président de Terre de Liens, France
WOESSNER, Julien, Fondation Charles Leopold Mayer pour le Progrès de l’Homme (FPH), Suisse
Modérateurs:
LERAS, Gérard, ancien éleveur laitier, ancien Vice-président de la Région Rhône Alpes en charge du foncier, AGTER, France
SIMONNEAU, Claire, Urbaniste, chercheur postdoctoral, Université catholique de Louvain, Belgique
Rapporteur:
FAYE, Iba Mar, Sociologue, chef de mission “agriculture familiale et terre”, GRET, Sénégal