Title, subtitle, authors. Research in www.agter.org and in www.agter.asso.fr
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Written by: Michel Merlet
Writing date:
Organizations: Institut de Recherche et d’Applications des Méthodes de Développement (IRAM)
Type of document: Research Paper
Merlet, Michel. Les fonds autogérés de développement: intérêt, enjeux et défis en matière d’appui institutionnels. IRAM. Programme REDEV. Janvier 2006. 28 p.
Les régions rurales du Nordeste du Brésil se caractérisent par une très grande pauvreté. Les programmes de développement rural exécutés depuis le début des années 70 n’avaient pas réussi à améliorer la situation. Toutefois, une composante expérimentale de l’un d’entre eux réussit en s’appuyant sur les capacités de planification et d’organisation des communautés rurales à obtenir un impact très positif dans la réduction de la pauvreté à un coût par bénéficiaire réduit. Cela a été l’origine de l’un des premiers programmes de développement à grande échelle conçu comme étant piloté par les communautés bénéficiaires elles-mêmes (CDD: Community Driven Development). Nous décrivons ici les principaux mécanismes de ces programmes à partir de l’exemple de la phase II du Programme de Lutte contre la Pauvreté Rurale, PCPR II - 2001- 2004.1
Le projet travaille dans 180 municipalités du Pernambuco sur 184 et en priorité avec les 110 municipalités les plus déshéritées (80 millions US$, dont 60 apportés par la Banque Mondiale). Il est structuré de façon telle que 90% des ressources disponibles soient consacrées aux projets locaux ("sous-projets communautaires"). [7% pour la formation des communautés rurales et des conseils municipaux, et pour des études et seulement 3% pour l’administration du projet en tant que telle].
Le programme combine des décisions prises à différents niveaux:
1/ l’Unité Technique du Programme, qui dépend d’une institution de l’Etat, fixe en détail les règles de fonctionnement et participe au ciblage des actions.
2/ les instances municipales (conseils des Fonds Municipaux d’Appui aux Communautés - FUMAC et FUMAC-Pilotes, jouissant d’un degré supérieur d’autonomie) affinent le ciblage et choisissent les projets.
3/ les communautés rurales préparent, présentent leur projet, et le réalisent, soit directement soit par le biais de prestataires de services.
Nature et fonctionnement des instances de décision locales: les Conseils des Fonds
Les conseils des FUMAC et des FUMAC-P sont des instances privées sans but lucratif, distinctes des conseils municipaux (chambre des vereadores).
Ils peuvent prendre la forme légale d’une association ou bien être créés par le pouvoir exécutif municipal, après approbation par le conseil municipal.
Ils font partie intégrante du système de gestion du programme, mais sont autonomes financièrement et administrativement par rapport au pouvoir politique.
Ils doivent être représentatifs, pouvoir prouver leur indépendance vis à vis des pouvoirs publics, et garantir que les décisions soient prises de façon publique et démocratique, avec des règles claires et en totale transparence.
La composition des Conseils des Fonds garantit une majorité absolue aux membres des communautés rurales: 80% doivent être des représentants des Associations Communautaires, du Syndicat des Travailleurs Ruraux, des Coopératives. Y sont aussi représentés, mais de façon minoritaire, les autorités municipales, les ONGs présentes dans la zone, les Églises, les autres segments de la société. Pour pouvoir assurer le suivi des actions financées dans la municipalité, les Conseils des FUMAC et FUMAC-P peuvent retenir 3% des montants financés pour leur fonctionnement. Ils reçoivent un appui du programme pour engager un assesseur technique qui est responsable de la gestion et de l’appui aux communautés et sert de lien avec l’Unité Technique.
Les Conseils des FUMAC gèrent également les Fonds Rotatifs constitués à partir des remboursements partiels sur les projets productifs. L’utilisation de ces ressources pour de nouveaux projets doit suivre les mêmes règles que celles du Programme.
Sélection des communautés
Les communautés bénéficiaires doivent être organisées en association. Seules peuvent être sélectionnées celles qui ne peuvent participer aux systèmes formels de financement, qui disposent de peu d’actifs et présentent des carences notoires en matière sociale. Ce sont les Conseils Municipaux qui recueillent ces données et hiérarchisent sur la base de la qualité de la vie, et de la disponibilité d’actifs économiques et sociaux. L’intérêt des communautés rurales à prendre part au programme doit être réel. Les demandes présentées doivent être légitimes, ce qui est le cas si les communautés ont participé à l’identification des projets. Les bénéficiaires doivent participer à l’exécution (cofinancement), à la gestion et à l’entretien des investissements. Les ressources doivent être utilisées à bon escient. Les Conseils doivent fonctionner correctement.
Les communautés qui ont réussi à sortir de l’extrême pauvreté et qui peuvent mobiliser de l’épargne locale et avoir accès à des sources alternatives de financement deviennent inéligibles aux financements à fonds perdus. Les ressources subventionnées du Programme peuvent alors être redirigées vers d’autres communautés. Ce processus est graduel, les exigences de cofinancement augmentant avec l’amélioration des conditions au niveau du village. Ce sont les Conseils FUMAC ou FUMAC-P qui sont responsables d’apprécier l’évolution des communautés et de les caractériser les unes par rapport aux autres, sur la base d’indicateurs économiques et sociaux et de l’évolution du capital sociétal et humain.
Conditions de financement
75% du financement des projets au plus est apporté par la Banque Mondiale. L’Etat apporte une contribution allant jusqu’à 25%. Les bénéficiaires doivent apporter entre 10 et 25% de la valeur du projet, suivant la nature du projet, qui peuvent prendre la forme de travail ou de matériels locaux. La population concernée doit en plus s’engager à ce que tous les enfants aillent à l’école, à ce que les programmes de vaccination et de santé soient appliqués et à la conservation de l’environnement et des conditions sanitaires de la communauté.
Les financements s’effectuent à fonds perdus, une modalité considérée nécessaire pour que des communautés très pauvres puissent réaliser une première accumulation d’actifs et pour qu’une partie des plus pauvres puisse se constituer un capital de base. Toutefois, les projets productifs orientés vers le marché doivent être en partie remboursés, afin de constituer un Fonds Rotatif qui sera géré directement par les Conseils des Fonds Municipaux. Par contre, les projets productifs destinés à améliorer les conditions de subsistance des habitants ou à la production de biens et services de faible rentabilité ne sont pas astreints à ce remboursement partiel. Les associations communautaires peuvent utiliser jusqu’à 8% du montant du projet pour engager l’assistance technique qu’elles jugent nécessaire. 25% de l’ensemble des fonds destinés aux projets communautaires peuvent être utilisés pour des projets productifs, 50% pour des projets d’infrastructure, et 25% pour des projets de développement humain.
Les procédures pour l’allocation des fonds
L’Unité Technique définit un montant indicatif de ressources pour chacun des Conseils municipaux, qui leur est communiqué pour qu’ils puissent établir leurs priorités. Celles-ci sont transmises aux associations communautaires comme référent et servent ensuite à analyser et sélectionner les projets.
Les Conseils sélectionnent les communautés éligibles. L’Unité Technique et/ou les Conseils appuient les associations lors de l’élaboration de leurs projets, en cherchant une articulation avec des projets d’amélioration des filières de la Région. Une visite préalable à la communauté, opérée par le bureau régional de l’Unité Technique, pour vérifier les données fournies est obligatoire.
L’Unité Technique vérifie lors des différentes étapes la conformité des demandes avec les règles qu’elle a établies. Les Associations peuvent solliciter le financement de plusieurs projets durant la période de fonctionnement du Programme, mais ne peuvent avoir qu’un seul projet productif financé en exécution à la fois. Ce n’est qu’une fois le projet terminé et exécuté de façon satisfaisante qu’une nouvelle demande peut être formulée.
Conditions d’éligibilité des projets locaux
Les projets locaux doivent satisfaire un certain nombre de conditions:
1/ s’inscrire dans le plan de développement défini par le Conseil de la municipalité,
2/ avoir été présentés par une association légalement constituée et avoir été considérés comme prioritaire par les communautés qui le sollicitent
3/ ne pas faire partie d’une liste de projets non éligibles
4/ faire partie de la liste indicative des projets et investissements éligibles, ou dans le cas contraire, avoir été autorisés par l’Unité Technique.
5/ rester, une fois finalisés, la propriété et sous le contrôle de l’Association bénéficiaire pour leur exécution et leur entretien
6/ représenter un coût inférieur ou égal à 50.000 US$, et ne pas dépasser la limite de financement définie pour la municipalité pour l’année.
7/ pouvoir être réalisés sur une période inférieure ou égale à un an. Les projets en plusieurs phases sont exclus
8/ ne pas dépendre d’un autre projet qui puisse interférer avec leur exécution
9/ avoir été préparés à partir des modèles de projet fournis par l’Unité Technique,
10/ présenter des coûts unitaires entrant dans des limites prédéfinies.
Quatre conditions supplémentaires s’appliquent aux projets productifs:
1/ les investissements restent propriété de l’Association, responsable de leur opération, entretien, et renouvellement.
2/ les bénéficiaires payent les services prêtés à un prix suffisant pour couvrir ces coûts. Un compte d’épargne est ouvert à cet effet.
3/ chaque type de projet dispose d’un règlement d’usage, approuvé en assemblée des bénéficiaires et accepté par l’Unité Technique et par le Conseil du Fonds
4/ l’Association doit démontrer qu’elle disposera de l’assistance technique nécessaire.
La place des Associations Communautaires
Elles constituent l’instance de représentation des bénéficiaires. Elles identifient les investissements prioritaires, élaborent les propositions, exécutent les projets approuvés et ayant fait l’objet d’une convention (pour ce faire, elles doivent constituer un comité d’accompagnement), assurent le fonctionnement et la gestion. La légalisation des associations étant obligatoire et souvent onéreuse, le programme aide la communauté à être exemptée de taxes.
Une fois un projet accepté, l’Association doit ouvrir un compte bancaire spécifique pour recevoir les fonds versés soit par l’Unité Technique, soit par le FUMAC-Pilote. L’Association doit tenir une comptabilité et garder les justificatifs de toutes les dépenses qu’elle effectue pour le contrôle du projet et pour les audits. L’acquisition de biens ou la passation de contrats doit respecter les procédures établies pour l’usage de ressources publiques. Des manuels de procédure sont remis aux Associations à cet effet.
Les rôles des Gouvernements Municipaux et des Organisations Non Gouvernementales
Le rôle des Gouvernements Municipaux se limite à faire connaître le programme et à stimuler la participation des bénéficiaires, en veillant à ne pas se substituer à eux. Ils peuvent participer au cofinancement des projets et fournir un appui logistique aux Conseils des FUMAC ou FUMAC-Pilotes.
Les Organisations Non Gouvernementales peuvent participer au programme à tous les niveaux du cycle des projets. La participation d’ONGs à des projets locaux doit être proposée par les bénéficiaires qui en décident les modalités. Elles peuvent aussi dispenser des services d’assistance technique ou réaliser des études pour le compte de l’Unité Technique ou celui des Conseils.
Récompenses et pénalités
Le programme exige un strict respect des règles qu’il a établies. Les Conseils FUMAC ayant bien travaillé peuvent aspirer à se transformer en FUMAC-P, plus autonomes, et/ou obtenir des volumes de ressources supérieurs. Les associations ayant eu de bons résultats peuvent accéder à des volumes d’investissements plus importants. Inversement, le programme établit des sanctions en cas d’irrégularités ou de détournements, allant jusqu’à l’exclusion des fautifs de la liste des bénéficiaires potentiels.
Le suivi et l’évaluation
Un programme de cette nature demande, en plus de mécanismes d’audit comptable, des mécanismes de suivi et d’évaluation. Le programme a mis en place une banque de données à partir de tous les projets locaux financés, un système de supervision de terrain. Il peut aussi faire des études spécifiques et évaluations périodiques. A partir de l’expérience acquise dans d’autres Etats, un système de suivi des projets, informatisé et accessible en réseau et par Internet, permet aux bénéficiaires de suivre l’itinéraire de leur demande de projet.
1 Information de base recueillie lors d’une mission de M. Merlet pour la Banque Mondiale dans le Nordeste brésilien en 2003.
Going further: discovering different dimensions of governance
linked to social organization
Donner le pouvoir de décision aux acteurs locaux