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Escrito por: Clara Jamart
Fecha de redaccion:
Organizaciones: Association pour contribuer à l’Amélioration de la Gouvernance de la Terre, de l’Eau et des Ressources naturelles (AGTER), Agence Française de Développement (AFD), Inter-réseaux Développement Rural, Association pour le Développement de l’Enseignement du Perfectionnement et de la Recherche à l’Institut national agronomique Paris-Grignon (Adeprina), Association pour la Redynamisation de l‘Elevage au Niger (AREN), LandNet West Africa, e-sud development
Tipo de documento: Artículo / documento de difusión amplia
Capitalisation sur l’expérience du Code Rural au Niger, Ensemble pédagogique pour l’alimentation de projection-débats.
Le Code Rural du Niger a été pensé depuis sa création, en 1993, comme un processus pérenne. Les textes juridiques qui composent le Code Rural, tout comme les institutions qui veillent à sa mise en œuvre, sont en évolution permanente. Où en est-on réellement aujourd’hui de la mise en place du Code Rural ? Le dispositif juridique a-t-il permis des avancées notables au niveau du droit ? Le dispositif institutionnel est-il efficace et joue-t-il pleinement son rôle ? Globalement, quels sont les acquis à mettre aujourd’hui au crédit du Code Rural au Niger ?
Un mode de gouvernance de la terre et des ressources naturelles plus collégial et plus participatif
Le Code Rural se définit comme un processus ouvert et participatif. La longue phase de débats sur la nécessité d’une politique foncière et agricole dans le pays, entre le début des années 1980 et l’adoption de l’ordonnance du 2 Mars 1993 portant les principes d’orientation du Code Rural, a permis de faire émerger un produit relativement consensuel, plus facilement applicable que les textes bureaucratiques imposés par le haut. Les débats ont été à la fois horizontaux et verticaux. Horizontaux dans le sens où tous les utilisateurs du foncier et des ressources naturelles (agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, etc.), y compris les utilisateurs les plus marginalisés (femmes, jeunes, nomades, etc.), ont été consultés sur leurs besoins et leurs attentes. Verticaux dans la mesure où les points de vue de ces utilisateurs ont été discutés à tous les niveaux, du village au département, puis agrégés à l’échelon régional, puis national. Aujourd’hui, le travail d’amélioration et d’approfondissement du Code Rural constitue, peut-être même plus qu’à l’époque de sa mise en place, une demande sociale très forte. La société civile nigérienne, mieux organisée, s’implique d’ailleurs de plus en plus dans ce travail d’approfondissement du Code Rural et d’élaboration de nouveaux textes sectoriels.
Les débats sur la mise en place du Code Rural ont vu le jour sous un régime d’exception, instauré après le coup d’état militaire de 1974, qui cherchait à définir une voie de développement original pour le pays. La théorie de la « Société de Développement » défendue par le régime de l’époque reposait sur un triptyque inclusif très novateur : « consultation, concertation, participation ». Depuis, malgré l’alternance politique et la profonde instabilité du système, cette volonté politique de faire du Code Rural un système participatif et inclusif n’a pas changée. Elle se retrouve d’ailleurs dans la composition même des commissions foncières qui, à tous les échelons, réunissent des autorités administratives, des services techniques, mais aussi des représentants des utilisateurs et des chefferies traditionnelles.
Ces chefferies traditionnelles qui, auparavant, étaient les seules à pouvoir attribuer des droits d’usage aux utilisateurs du foncier et des ressources naturelles, se retrouvent donc affaiblies par le système du Code Rural. Les chefs de canton ou de groupement, ainsi que les chefs de village ou de tribu sont inclus dans les commissions foncières, mais ils ne représentent qu’une voix parmi d’autres au sein de la commission. En outre, les autorités coutumières avaient traditionnellement pour vocation de rendre la justice en matière foncière. Aujourd’hui, elles jouent un rôle de conciliation mais ne peuvent en aucun cas trancher les conflits. La gestion de la terre et des ressources naturelles est donc plus collégiale, et le Code Rural, à ce titre, s’inscrit dans une avancée globale vers plus de justice, d’équité et de démocratie. En contribuant à la mise en place d’un espace de dialogue au niveau local à travers les commissions foncières, le Code Rural renforce aussi sa vocation de promouvoir un état de droit dans les villages nigériens.
Une diminution de la violence des conflits fonciers
En outre, le travail de prévention et de régulation mené par les différentes commissions foncières a permis de réduire le nombre de conflits fonciers ainsi que leur violence. La prévention des conflits constitue sans doute le volet sur lequel les commissions foncières, lorsqu’elles ont mené des actions en ce sens, ont connu les résultats les plus probants. Le travail de sensibilisation des populations agropastorales aux principes du Code Rural a favorisé une meilleure compréhension des enjeux, notamment ceux liés à la préservation des ressources communes comme les enclaves pastorales, les mares et les pistes de transhumance. Dans plusieurs départements, ces ressources communes ont été balisées - après un repérage précis des lieux - par les commissions foncières et en collaboration avec les villageois.
Ce travail de repérage et de balisage a permis d’éviter de nombreux conflits entre éleveurs et agriculteurs, en particuliers les conflits liés à l’extension des cultures sur les espaces réservés à l’élevage ou aux dégâts champêtres causés par les troupeaux dans des zones agricoles. Le travail de sensibilisation mené par les commissions foncières a également permis dans une certaine mesure de limiter l’installation de champs pérennes en zone pastorale, malgré une avancée évidente du front agricole au-delà de la limite Nord des cultures.
Lorsque les conflits éclatent néanmoins, les cofo servent d’outils de régulation et permettent souvent d’éviter des situations de trop grande violence pouvant entrainer la mort des protagonistes, comme cela était encore fréquent jusque dans les années 1990. En effet, en cas de conflits entre agriculteurs (sur la délimitation ou la propriété d’un champ par exemple), entre éleveurs (sur l’accès aux points d’eau, la construction de puits ou le surpâturage), ou entre éleveurs et agriculteurs (concernant la plupart du temps les dégâts champêtres et le grignotage des zones réservées à l’élevage par les cultures), les commissions foncières sont habilitées à intervenir pour essayer d’établir une solution de compromis. Elles jouent en quelques sortes le rôle de médiateur et permettent aux acteurs d’un conflit d’exprimer calmement leurs griefs et leurs requêtes, limitant ainsi le recours à la violence. Ce n’est que si la commission foncière échoue à trouver une solution à l’amiable entre les protagonistes du conflit que le dossier est ensuite remis aux mains de la justice.
Un instrument de référence pour la mise en œuvre des politiques nationales
Au-delà de ces avancées sur le terrain, le Code Rural se présente aujourd’hui comme un instrument de référence pour la mise en œuvre des politiques nationales, et c’est sans doute l’un de ses principaux acquis. L’adhésion croissante des différents groupes d’acteurs aux principes du Code Rural en fait un exemple réussi de politique concertée.
Ainsi, le Niger a adopté en novembre 2003 une Stratégie de Développement Rural (SDR), qui constitue le cadre de référence en matière de développement économique et social en milieu rural. Le Code Rural a été désigné comme outil pour faciliter la mise en œuvre de 5 des 14 programmes de cette stratégie. Par exemple, la SDR prévoit dans ses actions en faveur de la gouvernance locale des ressources naturelles l’approfondissement et la mise en œuvre concrète des principes d’orientation du Code Rural, la poursuite de la mise en place des commissions foncières et leur fonctionnement effectif. De même, dans son programme d’aménagement pastoral et de sécurisation des systèmes pastoraux, la SDR confirme que la mise en application des principes du Code Rural dans les espaces dédiés à l’élevage constitue un préalable à l’investissement des différents acteurs privés ou institutionnels pour aménager ces zones.
Parallèlement, le Code Rural est souvent considéré à la fois comme un modèle d’inspiration et un outil puissant pour la mise en place des politiques de décentralisation. Au Niger, la décentralisation date de 2004 et a pour objectif de mettre en œuvre une nouvelle organisation territoriale et administrative, en vue d’améliorer l’encadrement du développement économique et social. Au contraire des autres pays de la sous région, qui se sont lancés dans des processus similaires, le Niger peut faire valoir l’expérience du Code Rural comme première expérience de décentralisation dans le domaine spécifique de la gestion foncière. Cette expérience pionnière peut donc constituer une source d’inspiration et servir de référence dans la mise en œuvre de la politique de décentralisation. Elle peut aussi servir d’outil de renforcement de la décentralisation, dans la mesure où, par exemple, la Code Rural a déjà mis en place 145 commissions foncières communales sur un total de 265 communes créées, et ainsi participé très tôt à la mise en œuvre effective d’une gestion décentralisée du territoire.
Cette fiche fait partie d’un dossier pédagogique, qui accompagne un film documentaire consacré à l’expérience du Code Rural du Niger. Ce travail résulte d’une initiative commune d’AGTER, de la société E-sud Développement, de l’AREN (Association pour la Redynamisation de l‘Elevage au Niger) et du réseau LandNet West Africa. Il a été organisé dans le cadre d’un travail de capitalisation d’Inter-Réseaux et a reçu un appui financer de l’Agence Française de Développement.