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Escrito por: Mamy Rakotondrainibe, Colectif TANY
Fecha de redaccion:
Tipo de documento: Artículo / documento de difusión amplia
À l’initiative de la Commission des îles de l’océan indien (COI), Madagascar fait l’objet d’un vaste projet de culture et d’exportation de produits agricoles destinés à assurer la sécurité alimentaire dans cet espace régional. Mais ce processus conçu en pleine crise politique malgache laisse craindre des accaparements de terres qui léseraient les paysans et les populations, ce qui serait contraire aux objectifs fixés. La réunion des investisseurs, opérateurs, partenaires techniques et financiers prévue à Mahajanga, à l’ouest de Madagascar, les 25-27 mars 2013, avec la participation du gouvernement malgache de Transition et des autorités régionales, constitue une étape-clé vers des « engagements concrets » des différents intervenants.
Le projet de la COI de faire de Madagascar le « grenier de l’Océan Indien » - car la Grande Ile contiendrait 90% des terres cultivables de cette zone - alerte des citoyens de Madagascar et le Collectif TANY sur le risque élevé d’accaparements de terres que véhicule ce projet.
Informé de la tenue de la réunion sur « la sécurité alimentaire dans l’Indianocéanie – Investir dans la production Agricole », qui aura lieu à Mahajanga les 25 et 27 mars 2013, sous l’égide de la Commission de l’Océan Indien (COI), le Collectif pour la Défense des Terres Malgaches - TANY souhaite attirer l’attention des participants, concepteurs et décideurs impliqués dans ce projet visant à faire de Madagascar le « grenier de l’Océan Indien ».
Plusieurs points importants doivent être pris en considération dans cette réunion qui s’inscrit dans la continuité d’un vaste projet agricole à Madagascar élaboré par la COI et s’appuyant sur les Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) de Madagascar. La COI, composée de 5 Etats-membres - Comores, France/Réunion, Madagascar, Maurice, et Seychelles-, risque d’aller à l’encontre de sa mission de « resserrer les liens d’amitié et de solidarité entre les populations, et de bâtir des projets régionaux de développement durable, destinés à les protéger, améliorer leurs conditions de vie et préserver les ressources naturelles dont elles dépendent fortement » 1.
Le projet se trouve dans une phase très avancée
Tout en appuyant le processus de règlement de la crise politique à Madagascar, la COI a élaboré ce programme agricole depuis 2011 2. Elle s’appuie sur un rapport réalisé début septembre 2012 à sa demande par le consultant et expert mauricien Shafick Osman 3. Après une réunion de « brainstorming » à Antananarivo, le projet a été promu en objectif lors du 8e Forum des îles de l’Océan Indien à la Réunion 4 où s’est rendue une délégation malgache de 80 membres. Un atelier préparatoire de la rencontre Plateforme prévue à Mahajanga s’est tenu à la mi-janvier 2013 dans la capitale malgache.
Dans le contexte politique actuel, il est illégitime de faire progresser un tel projet agricole à Madagascar. Il faut attendre la fin des élections présidentielle, législatives voire communales pour que des représentants élus par les Malgaches participent aux discussions. Ce projet, qui vise la sécurité alimentaire des populations des 5 îles, nécessitera de vastes surfaces à Madagascar.
Selon plusieurs sources, le secrétaire général de la COI, Jean-Claude de l’Estrac, a fait état d’une demande de concessions de terres ayant obtenu l’accord des autorités malgaches 5. Il s’agirait de 20000 ha dans la région du Menabe 6. Le gouvernement malgache de Transition n’est pas habilité à prendre de telles décisions 7 et les autorités nationales comme régionales restent étrangement silencieuses sur les tenants et aboutissants de l’ensemble de ce projet.
Respecter les droits fonciers légitimes des Malgaches
Le plan de la COI se base sur l’idée dangereuse qui considère Madagascar comme un réservoir de terres cultivables pour l’Océan Indien occidental car il constitue « 90% des terres arables de la COI » et en raison de l’existence de vastes zones non cultivées 8.
Il est important de souligner qu’une partie des terres malgaches est constituée de montagnes aux pentes trop abruptes pour permettre des cultures, de millions d’hectares de carrés miniers, de zones forestières et d’aires protégées. Les surfaces que certains considèrent comme « vacantes et sans maître » sont occupées par des paysans qui y vivent et les cultivent depuis des générations ou les utilisent pour l’élevage extensif et les pâturages. Les conflits sur les terres les plus fertiles opposant les communautés locales avec leur modèle d’agriculture familiale aux nouveaux investisseurs sur les terres agricoles, sont connus à Madagascar, et la concurrence entre opérateurs sur les rares terres propices à l’agribusiness est documentée par l’Observatoire du Foncier 9.
À l‘instar des Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale de la FAO 10, le dernier rapport de la Banque Mondiale intitulé « Croissance de l’Afrique : libérer le potentiel du secteur agroalimentaire » 11 réaffirme la nécessité de respecter les droits d’usage coutumier des terres des familles rurales pour leur propre subsistance et le développement de leurs revenus.
Ces droits fonciers légitimes doivent être pris en compte de manière effective et sérieuse par toutes les parties prenantes du programme de la COI. Dans le cas contraire, ce projet destiné à la sécurité alimentaire des populations des îles de l’Océan Indien constituerait une source d’« accaparements de terres » à Madagascar en lésant les droits de la population malgache et en portant atteinte à sa sécurité alimentaire.
L’exigence de transparence et de bénéfices pour les paysans
Trois régions sont d’ores et déjà identifiées comme zones pilotes. Les populations locales ont-elles été consultées dans le Menabe, notamment sur la zone de 20 000 ha déjà évoquée, ainsi que dans le Vakinankaratra, destinés à la culture et l’exportation de riz, et dans la Sofia pour la production d’oignons? 12 13. Quelles propositions concrètes ont été formulées pour les paysans concernés ?
Une totale transparence sur le projet de la COI est requise : cartographie précise des zones identifiées, type d’appropriation foncière et de transaction (bail emphytéotique, achat, etc.), mode de production agricole prévu dans chaque cas (contrat avec les petits exploitants locaux ou agribusiness), nombre d’emplois pour les travailleurs malgaches créés par les sociétés agricoles, revenus attendus des taxes à l’exportation, etc..
À la Réunion comme à Maurice, des institutions et autorités publiques mettent en œuvre dans le cadre de ce projet une stratégie d’investissements dans l’agriculture sur les terres malgaches. Dès mars 2011, le Ministre des Affaires Etrangères de l’île Maurice Arvin Boolell a encouragé les opérateurs économiques mauriciens à s’intéresser à Madagascar 14 15, alors que le Conseil Général de la Réunion a investi dans la recherche sur le riz bio malgache 16 et souhaiterait acquérir des rizières selon certaines sources 17.
Reste que l’ancien président de la Chambre d’Agriculture de La Réunion a émis des réserves vis-à-vis du projet de faire de Madagascar le « grenier de l’Océan Indien ». Il insiste pour que l’accord soit limité au riz et craint que d’autres produits malgaches inondent les marchés locaux au détriment des productions locales de la Réunion.
Côté malgache, le ministre de l’Agriculture a, lui, déclaré que «L’objectif est d’avoir une autosuffisance en riz d’ici 2018 avec une production de 12 millions de tonnes» 18, mais aucun élément concret ne vient corroborer une telle affirmation. À l’initiative des CCI, des représentants régionaux ont été amenés à négocier directement avec des investisseurs lors du dernier Forum des Îles de l’Océan Indien à La Réunion 19.
Les différents impacts et bénéfices pour les petits exploitants malgaches méritent davantage d’études et d’éclaircissements. Un tel projet de coopération régionale visant la sécurité alimentaire de l’Océan Indien doit mettre l’accent sur l’avenir des paysans de Madagascar et des autres îles.
Paris, 22 mars 2013
Le Collectif pour la Defense des Terres Malgaches – TANY (patrimoinemalgache@gmail.com)
Voir:
1 Source: Note_conceptuelle_journalistes.pdf sur economy.ioconline.org/
2 www.federationccimada.org/files/conceptnote-tableronde-mjn.pdf
5french.news.cn/afrique/2012-08/27/c_131809227.htm
6www.lexpressmada.com/cooperation-regionale-madagascar/38975-la-cooperation-agricole-prioritaire.html
8society.ioconline.org/uploads/media/Discours_du_SG-er_forum_EFOI_oct2012__2__01.pdf
9www.observatoire-foncier.mg/downloads/After-Daewoo-engl-2011.pdf
10www.fao.org/fileadmin/templates/cfs/Docs1112/VG/VG_Final_FR_May_2012.pdf Cf. articles 3b6, 3b8, 3b9, 7.3, 9.9, 12.2
11www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2013/03/04/africa-agribusiness-report
13www.lexpressmada.com/5426/riziculture-madagascar/40154-deux-nouveaux-greniers-a-riz-en-vue.html
15www.lagazette-dgi.com/index.php?option=com_content&task=view&id=11363&Itemid=57
16madagascar.cirad.fr/recherche_en_partenariat/cooperation_dans_l_ocean_indien/qualireg
17www.clicanoo.re/355651-la-reunion-veut-acheter-des-rizieres-a-madagascar.html
19www.newsmada.com/index.php/economie/3451-feioi-madagascar-est-de-la-partie#.UUTU11clKOg