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Fondo Documental Dinámico
sobre la gobernanza de los recursos naturales en el mundo

Aspects et particularités de la domanialité en Afrique de l’Ouest

Resumen

Les régimes fonciers ouest-africains ont la caractéristique de reposer sur des conceptions particulières de la domanialité.Le propos de cette fiche est de clarifier les différentes conceptions de la domanialité,afin de mieux évaluer leurs implications sur les politiques foncières et de comprendre l’originalité de la domanialité africaine.

La domanialité désigne le régime des biens appartenant aux personnes publiques. Elle bénéficie d’une longue et très riche histoire. Mais à travers les continents, sous le même mot se cachent des réalités très diverses. Historiquement, dans les pays d’Europe et dans leurs anciennes colonies, la domanialité a pris diverses formes en fonction de la nature des droits détenus par l’autorité publique : domanialité seigneuriale, domanialité coloniale, domanialité publique et privée, etc. Même cette typologie historique n’est pas encore bien établie. Or, on observe en Afrique l’émergence de nouveaux concepts qui rendent la clarification encore plus nécessaire. L’existence de plusieurs définitions peut, en effet, ouvrir sur des ambiguïtés.

Le domaine public

Dans de nombreux États, on appelle domaine public les biens fonciers qui d’une part relèvent de la propriété de l’État mais qui, d’autre part, sont caractérisés par leur affectation à l’usage du public. Les biens du domaine public relèvent d’un régime de droit public particulier, destiné à en assurer la protection et à préserver leur affectation à l’usage du public. Ainsi, les biens du domaine public sont inaliénables (l’État ne peut pas les vendre ou en transférer la propriété). Font partie du domaine public :

  • les biens affectés à l’usage collectif du public, tels que voies, rivages de la mer ;

  • les biens affectés à un usage individuel du public (cimetières, emplacements de marchés, parkings payants, etc.) ;

  • les biens affectés à un service public, sous réserve qu’il ait un rapport avec le service public en question et qu’il ait été aménagé à cette fin (ex. : les terrains nécessaires à la réalisation et l’aménagement d’une voie ferrée, d’un gazoduc, d’une ligne électrique). En fonction du type d’utilisation auquel il est affecté ou du type d’espace concerné, le domaine public sera qualifié de maritime, aérien, fluvial, terrestre, mobilier ou militaire. Le domaine public est défi ni par opposition au domaine privé. Sont des biens de son domaine privé, les biens appartenant à l’État et qui sont détenus et gérés par lui dans les mêmes conditions que les biens des particuliers.

Contrairement aux biens du domaine public, les biens du domaine privé peuvent faire l’objet d’aliénation. Il en est ainsi notamment des biens immobiliers que l’État peut louer ou vendre à des particuliers. Relèvent également de leur domaine privé, les terres rurales que l’État peut concéder à des particuliers ou les terres urbaines que des communes peuvent céder à des particuliers à travers des opérations de lotissement.

Les situations de monopole foncier

Les États africains ne semblent pas se satisfaire de la distinction classique entre domaine public et domaine privé. Ils ont en effet inventé de nouveaux concepts domaniaux, qu’il convient de clarifier et de justifier. C’est le cas notamment de la notion de domaine national. L’apparition, dès le milieu des années 1960, de la notion de domaine national ou de domaine foncier national dans de nombreuses législations africaines constitue une innovation majeure, mais non homogène. Le domaine national est l’expression d’un monopole foncier de l’État : l’État détient toutes les terres ou une partie des terres non pas en son nom propre mais au nom de la Nation dont il est le représentant.

A. Rochegude et C. Plançon proposent la définition suivante : Domaine national : Nouveau concept fréquemment utilisé en Afrique (au moins francophone), et qui peut correspondre à des situations juridiques très diverses, comme au Mali où le domaine national correspond à un cadre juridique d’ensemble pour tous les statuts des terres [ce qui veut dire que le domaine national englobe toutes les terres], ou au Sénégal, où il correspond à l’ensemble des statuts fonciers [des terres] qui ne se rattachent pas au domaine public, ni au domaine approprié juridiquement [c’est-à-dire les propriétés privées titrées]. »

À partir de cette définition, on peut donc distinguer deux cas de figure. Celui où le monopole foncier est total, c’est-à-dire que le domaine national constitue une catégorie juridique applicable à l’ensemble des terres ; ensuite celui où le monopole foncier est partiel, c’est-à-dire que le domaine national intègre seulement une partie des terres. En général, ce concept de domaine national s’accompagne d’un régime de concessions ou de droits d’usage, destiné à organiser la mise à disposition par l’État des terres, au profit notamment des particuliers, pour leurs besoins d’utilisation et d’exploitation.

Les situations de monopole foncier intégral de l’État

Certains pays ont opté en faveur de la domanialité globale des terres. Il s’agit de l’institution du Fundo Estatal de Terras au Mozambique, du Património comun de todo o Povo en Guinée Bissau, ou du domaine national au Mali. Une comparaison entre quelques-uns de ces pays donne immédiatement un exemple de la possible ambiguïté du concept de domaine national.

  • En Guinée Bissau, la loi dispose que la terre est « propriété de l’État et patrimoine commun de tout le peuple ». Pour permettre la réalisation des activités productives et sociales sur la terre, l’État peut accorder aux particuliers des droits d’usage privatifs, notamment à travers l’usage commun ou la concession.

  • Au Mali, le Code domanial et foncier décide que le domaine national du Mali comprend l’ensemble des terres, c’est-à-dire les domaines public et privé de l’État, les domaines public et privé des collectivités territoriales et le patrimoine foncier des autres personnes, physiques et morales.

  • Comme au Mali, le domaine national mozambicain, exprimé à travers le concept de Fundo Estatal de Terras, constitue une catégorie plus large que celle de domaine public (Domínio Público). Il ne faut donc pas confondre domaine national et domaine public car il existe donc une catégorie domaniale plus importante que celle du domaine public, à savoir une domanialité globale et constitutionnelle, qui, à l’inverse de certaines autres législations, est clairement revendiquée ; et au sein de cette domanialité étatique globale, un domaine public qui, lui, n’est pas fondamentalement différent de celui qui existe dans de nombreux autres pays.

Les situations de monopole foncier partiel de l’État

Dans un certain nombre de pays, un domaine foncier national ou domaine national est constitué avec les particularités suivantes : il ne concerne pas la totalité des terres du pays, et il ne se confond pas avec les domaines public ou privé de l’État. Constitué de terres non immatriculées et, de ce fait, présumées vacantes et sans maître, ce domaine national ou monopole foncier partiel de l’État existe au Sénégal, au Togo, au Cameroun, au Gabon, par exemple. S’inspirant des principes de gestion foncière coutumière, cette approche vise à constituer des sortes de « réserves foncières nationales » par intégration des terres coutumières considérées comme inexploitées ou insuffisamment mises en valeur dans un « domaine national », destiné à être affecté aux opérations de développement rural.

  • Au Sénégal, premier pays ouest africain à avoir forgé ce concept dans une loi en 1964, le domaine national inclut de plein droit « toutes les terres non classées dans le domaine public, non immatriculées ou dont la propriété n’a pas été inscrite à la conservation des hypothèques… » à la date d’entrée en vigueur de la loi. Le domaine national sénégalais comprend donc de fait, les terres anciennement détenues en vertu des principes coutumiers et que l’État détient au nom de la Nation en vue « d’assurer leur utilisation et leur mise en valeur rationnelles, conformément aux plans de développement (…) ». Dans la perspective de cette utilisation rationnelle, les terres du domaine national sont classées dans les quatre catégories ci-après : zones urbaines, zones classées, zones des terroirs, zones pionnières. Les zones pionnières notamment correspondent aux espaces pouvant être aménagés conformément aux plans de développement ; les terres de ces zones sont affectées par décret aux communautés rurales, à des associations coopératives ou à des organismes créés par le gouvernement.

  • Au Togo, le « domaine national » comprend toutes les terres autres que celles appropriées par les particuliers, et celles qui entrent dans le domaine public et privé de l’État. Concrètement, le domaine national est constitué de fait par les terres relevant anciennement de la coutume (terres non immatriculées au profit de l’État ou des particuliers).

Les non-dits de l’idée de monopole foncier de l’État

La notion de « domaine national » est selon H. Ouedraogo liée à l’histoire post-coloniale des États.

« Sortis des indépendances avec des rêves d’un décollage du développement économique fondé sur l’agriculture, les États de la sous-région [ouest-africaine] ont préféré avoir entre leurs mains les cartes foncières, afin d’opérer une redistribution aux acteurs jugés capables d’entreprendre l’exploitation agricole avec des méthodes modernes de production ».

À l’origine du concept, la domanialité était unilatérale en ce sens qu’en employant la notion de terres vacantes, le pouvoir décidait qu’il était le seul à avoir le droit de régler leur sort. Le constat de la vacance et l’intégration dans le domaine national évitaient d’en passer par de strictes et contraignantes procédures d’expropriation pour cause d’utilité publique. Ce sont les séquelles des processus coloniaux : le raisonnement se fonde sur le régime colonial de l’immatriculation, comme source de toute légalité foncière. Tout se passe comme si celui-ci avait réglé le statut de toutes les terres ordinairement occupées, les autres étant censées être libres et vacantes. On dit : si les populations qui exercent des droits coutumiers pouvaient présenter des titres, les choses seraient différentes. Mais puisqu’elles ne le peuvent pas — l’immatriculation lancée à l’époque coloniale ayant été un échec sévère — les gouvernements peuvent donc appliquer par défaut le raisonnement que toute terre non immatriculée appartient à l’État. Cependant, la reconnaissance des droits coutumiers commence à faire de sensibles progrès dans divers pays.

La constatation du vide, réel ou supposé, est l’argument qui conduit ensuite à l’appropriation sous la forme de la domanialité coloniale ou postcoloniale. La domanialité est un statut attribué à des terres parce qu’on observe ou parce qu’on se satisfait de croire qu’elles sont inoccupées. L’emploi de la notion de domaine ou de domanialité est donc très délicat.

Bibliografía

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