Title, subtitle, authors. Research in www.agter.org and in www.agter.asso.fr
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Written by: Camille Jahel
Writing date:
Organizations: Association pour contribuer à l’Amélioration de la Gouvernance de la Terre, de l’Eau et des Ressources naturelles (AGTER), AgroParisTech, University of Antwerp, Universidad Centroamericana UCA de Nicaragua (UCA), Comité technique « Foncier et développement » (CTFD)
Type of document: Paper / Document for wide distribution
L’article est issu du travail réalisé en 2013 au cours d’un stage de Master Recherche (Dynamiques comparées des développements - Université Paris X – Nanterre) au sein d’AGTER et avec l’Université Centroaméricaine de Managua (UCA), suivi par Pierre Merlet (AGTER et Université d’Anvers) et Hubert Cochet (AgroParisTech).
Ce document a été produit avec l’appui du projet mobilisateur « Appui à l’élaboration des politiques foncières » piloté par le Comité Technique Foncier et Développement (www.foncier-developpement.fr). Son contenu n’engage que ses auteurs et ne reflète pas la position de l’administration française ni celle du Comité Technique « Foncier et Développement ».
Cette fiche a été rédigée au terme d’un travail de diagnostic agraire au nord du Nicaragua, commandité par AGTER, dans le cadre d’un stage cofinancé par le Comité Technique Foncier et Développement. La zone d’étude subit depuis une dizaine d’années de fortes mutations, du fait de l’implantation et de la croissance d’une entreprise multinationale productrice de canne à sucre.
L’entreprise cultive elle-même la canne sur 13000 hectares et passe des contrats avec des producteurs indépendants, pour une surface totale d’environ 12000 hectares.
Cette étude présente une analyse des relations contractuelles entre les producteurs sous contrat (ou ‘colonos’) et l’agro-industrie sucrière, en mettant en exergue les intérêts et stratégies des deux parties.
L’information présentée ici provient de différentes sources :
un contrat1 fourni par un producteur indépendant de canne
des factures et reçus entre l’entreprise de canne et les producteurs sous contrat et qui détaillent les aspects financiers et économiques de la relation
Une trentaine d’entretiens technico-économiques réalisés auprès de producteurs indépendants, de salariés de la multinationale et autres acteurs travaillant dans la zone.
L’observation des pratiques entre producteurs sous contrats et entreprise au travers d’un processus d’immersion de 6 mois dans la zone d’étude
La contractualisation comme stratégie d’agrandissement
Rapide présentation de la zone
La zone d’étude est située au Nord de la plaine pacifique du Nicaragua, dans le département de Chinandega, à proximité du Salvador et du Honduras. Elle s’étend sur une superficie d’environ 300 km2, et est constituée d’une plaine alluvionnaire délimitée à l’est et à l’ouest par des massifs volcaniques et au nord par un estuaire.
Issus de transformations et redistributions de matériaux de cendres volcaniques et de pyroclastes, les sols de la plaine sont réputés pour être les meilleurs d’Amérique Central, de par leur profondeur, leur bon drainage et leur structure limoneux-sableuse. La plaine bénéficie aussi d’un réseau hydrique dense et peu profond. La canne à sucre y est la culture prédominante, elle couvre plus de 80 % de l’espace. La partie Est de la plaine présente des sols un peu plus sableux, plus adaptés à la culture de l’arachide. C’est donc cette dernière qui prédomine dans cette zone.
FIGURE 1: BLOC DIAGRAMME SCHEMATIQUE DE LA ZONE (SOURCE : JAHEL)
Des systèmes de canne et d’arachide dont les produits sont destinés à l’exportation sont mis en place par des entreprises agricoles à salariées ayant toutes la stratégie de s’agrandir. L’expansion de la canne est menée par le groupe Pantaleon, qui prévoit d’augmenter ses capacités de transformation et de se lancer dans la production de bio-éthanol. Pour l’arachide, les propriétaires de l’entreprise SERAGRO, possédant et cultivant la majorité des parcelles, possèdent des parts dans l’entreprise COMASA chargée de la transformation de l’arachide en huile. Ces producteurs ont eux aussi tout intérêt à augmenter leurs surfaces.
Or, il apparait que les possibilités pour ces entreprises d’augmenter leurs surfaces dans des zones adjacentes est limitée. On constate, en effet, que sur trois de ses côtés, l’espace est délimité par des frontières naturelles : la mer à l’Ouest, les montagnes et l’estuaire au Nord et le volcan à l’Est. De plus, les terres qui s’étendent au Sud appartiennent à une autre grande sucrerie. La ressource en terre est donc limitée alors que la demande de la part de ses entreprises pour acquérir de nouvelles aires augmente chaque année. En même temps, peu de personnes vendent, préférant plutôt avoir recours à la location. Ceci explique la flambée des prix de la terre (dans la plaine 800 US$ par hectare en 2000, 4 à 6 000 US$ aujourd’hui). De plus, le marché de la location est tellement saturé et la demande si forte qu’il est en général nécessaire de réserver une location en signant le contrat 1 an à l’avance. La rente foncière obtenue par les propriétaires de la zone est donc considérable.
Pour pallier cette difficulté d’accéder au foncier que ce soit au travers de l’achat ou de la location, la sucrerie développe un système de contractualisation avec les producteurs indépendants dans l’optique d’augmenter la production finale de sucre. Depuis 2009, cette forme de contractualisation est en croissance, avec en moyenne une augmentation de 1 600 hectares chaque année depuis 3 ans.
Qui sont les producteurs sous contrat ?
Ils sont environ 150 producteurs et leurs parcelles en canne à sucre couvrent 48 % de la surface totale en canne à sucre dans la zone. Sur ces 150 producteurs, 60 ont entre 1 et 7 hectares, et les 90 autres en ont plus de 14 (le plus grand possédant un millier d’hectares).
Modalités du contrat entre colonos et multinationale2
Répartition du travail et avance du capital
Durant tout le processus de production, la sucrerie et le producteur se partagent le travail. Alors que ce dernier est chargé du semis (mais les producteurs n’ont le droit de semer que les semences vendues par la sucrerie), de l’épandage des produits et de la surveillance des parcelles, l’entreprise effectue la récolte (service qu’elle fait payer au producteur).
L’entreprise vend aussi des services (scarification, épandage mécanique), surtout aux petits producteurs qui ne possèdent pas de tracteur.
Cette relation fait penser à une sorte de métayage inverse où le métayer, possédant la terre et la force de travail, signe un contrat pour recevoir du capital. La sucrerie prête avec intérêts (environ 5% annuel) le capital permettant de cultiver la canne, de façon à créer les conditions nécessaires à chaque producteur de la zone pour convertir son système de production vers la production de canne à sucre.
À la fin du cycle, la sucrerie achète la récolte, mais déduit du paiement brut un montant correspondant au coût (plus intérêt) des services et intrants fournis par l’entreprise durant le cycle de culture.
L’entreprise négocie de plus avec des banques privées pour que le contrat signé avec l’entreprise puisse servir de garantie à des prêts (en général 700 $/hectare avec en intérêt d’environ 11% annuel) donnés aux producteurs. Ces arrangements impliquent cependant un paiement direct de la dette par l’entreprise qui déduit le montant du remboursement du paiement net de la canne achetée au producteur.
Un engagement du producteur pendant tout le processus de transformation, pour diminuer les risques et les coûts
C’est la sucrerie qui fixe le prix d’achat de la canne au producteur, sans que ce dernier n’ait aucun pouvoir de négociation. Elle rémunère le producteur en lui donnant 50 % des recettes de la vente du sucre issu de sa canne. Pour une tonne de canne obtenue par un producteur, la sucrerie va fabriquer 100 Kg de sucre qu’elle vend en moyenne un peu plus de 50 US$3. De cette somme, la sucrerie retire les impôts fiscaux et municipaux, garde la moitié de ce qui reste et donne l’autre moitié pour rémunérer le producteur. À ces environ 25$ payés au producteur pour 1 tonne de canne, la sucrerie déduit le coût des services et intrants vendus, ainsi que le montant des intérêts et le remboursement d’une éventuelle dette a la banque garantie avec le contrat.
En résumé, le service rendu par la sucrerie pour la transformation de la canne coûte au producteur 50% de la valeur du produit final, puisque le prix d’achat de la canne est indexé sur celui du sucre. Le producteur est donc exposé, au même titre que la sucrerie, aux fluctuations du marché.
Il est à noter que, pour l’entreprise, le coût de la transformation de la canne représente 20% de la valeur du produit final. L’entreprise récupère donc un bénéfice net de 30% de la valeur du produit finale (50% vont rémunérer le colonos et 20% servent à transformer la canne en sucre).
En procédant de la sorte, la sucrerie développe une stratégie de diminution des risques. Le producteur est lié à sa production même après l’avoir fournie à la sucrerie. Par exemple, si le sucre ne peut pas se vendre, le contrat stipule que producteur devra payer la moitié des frais de stockage.
Diminution des coûts pour la sucrerie, par mutualisation
Mais ce n’est pas seulement au niveau du processus de transformation que le producteur est engagé par le contrat. La sucrerie fait aussi participer tous les producteurs de canne aux frais de maintenance des chemins et de contrôle du feu de la zone. Cette information est intéressante lorsque l’on sait que l’argument principal de l’agro-industrie sucrière pour valoriser son image et se donner de la légitimité est justement sa participation active à l’amélioration des infrastructures de la zone.
De même, le contrat stipule qu’en cas d’intempéries graves qui empêcheraient la sucrerie de venir récolter chez un producteur, tous les producteurs en contrat avec la sucrerie devraient payer, pour compenser la canne perdue. En faisant intervenir d’autres producteurs, la contrat représente donc bien plus qu’une relation bipartite entre ceux qui le signent (colono et entreprise). Il lie en effet tous les colonos entre eux en cas de catastrophe naturelle et la sucrerie évite ainsi d’assumer seule le coût des pertes dues aux intempéries.
Au contraire, si le producteur a une récolte de mauvaise qualité ou perd une partie de sa récolte à cause d’un incendie, la sucrerie lui inflige une pénalité pouvant aller jusqu’à une diminution de 50% du prix d’achat de la canne. Dans ce sens-là, il n’existe pas de système de mutualisation entre sucrerie et producteurs.
Absence de pouvoir de décision du producteur
Finalement, le producteur n’a aucun pouvoir de décision durant tout le processus, si ce n’est, en phase initiale, sur le fait d’accepter ou non le contrat. En signant ce contrat, il s’engage à ne vendre sa canne qu’à la sucrerie et à se soumettre à sa politique de prix et d’organisation.
Les colonos perdent alors leur statut de producteur, et deviennent des sous-traitants, des ouvriers paysans.
Un contrat menant à l’accaparement des richesses par l’agro-industrie sucrière
Monopolisation du processus de production
Il est intéressant de constater que dans les dépenses d’un producteur de canne, la majeure partie est destinée à payer les services de l’entreprise sucrière (figure 2). Le calcul présenté dans ce graphique a été effectué sur l’ensemble du processus de production. Le poste de dépenses le plus important est la récolte faite par l’entreprise, dans laquelle sont compris les frais de transport, de déchargement, de pesée, de maintenance des chemins et de contrôle du feu.
L’entreprise s’assure ainsi un monopole dans tout l’itinéraire technique, réduisant de manière considérable la marge de manœuvre du producteur.
Des contrats facilitant l’accaparement de la valeur ajoutée dans le processus de transformation
Le contrat stipule que seuls les bénéfices tirés de la vente du sucre sont partagés entre les producteurs et la sucrerie. Or, avec la transformation de la canne, la sucrerie produit aussi à moindre coût de l’électricité, qu’elle vend ensuite. Dans les calculs ne sont pas pris en compte l’électricité intra consommée ni les engrais organiques dérivés des résidus de canne, intra consommés eux aussi (qui représentent néanmoins une économie annuelle de plus de 13 millions de U$ pour l’entreprise). En tenant compte des recettes de la vente d’électricité, on constate que la sucrerie conserve presque 50% des recettes issues de la canne produite par un producteur indépendant (figure 3).
Monopole de l’entreprise sucrière
Deux entreprises sucrières sont installées dans le département de Chinandega, Pantaleon au Nord et San Antonio au sud. La distance séparant les deux usines sucrières étant faible, il serait de fait tout à fait techniquement possible pour les producteurs de vendre à l’une ou à l’autre. Mais ces derniers n’ont pas pour autant le choix de l’entreprise avec qui ils souhaitent entrer en contrat : les deux agro-industries se sont réparties la zone, de manière à ce que chaque producteur soit assigné à l’une d’entre elle selon sa situation géographique. Cela crée une situation de monopole, qui fait que le producteur n’a aucun pouvoir réel de négociation. L’entreprise établit seule les règles du contrat et décide unilatéralement des prix qu’elle applique.
Conséquences pour les petits producteurs
Finalement, en signant un contrat de ce type, le producteur se retrouve dans une situation de dépendance totale face à l’agro-industrie, qui lui impose une grande partie de l’itinéraire technique et décide des prix.
Concernant les plus petites exploitations en contrat, la situation du producteur de canne pose aussi des problèmes d’acceptation sociale : la culture de la canne est associée aux problèmes environnementaux et de santé connus par les producteurs de la zone. Voir un de leurs voisins signer un contrat avec ceux qui sont considérés comme des acteurs nuisibles engendre souvent une exclusion sociale de cette personne4.
En dehors des problèmes que peuvent poser la signature de contrats très contraignants, la monoculture de la canne, plantée pour 5 ans minimum, risque d’appauvrir les terres du producteur, menacé de ce fait d’avoir de moins bons rendements pour les prochaines années.
Les producteurs de petite taille ont-ils le choix de faire des contrats ?
Comparaison entre les systèmes de maïs-haricot, l’élevage et les systèmes basés sur la production de canne.
Tous les producteurs sous contrat avec la sucrerie, interrogés sur la raison de leur conversion à la canne, répondent que cette culture est plus rentable que leurs anciennes activités agricoles (petit élevage, maïs, riz…).
On constate qu’aujourd’hui, le revenu par actif est effectivement plus élevé pour les petites exploitations de canne que pour les éleveurs et les exploitations ayant quelques vaches, une parcelle de maïs et un jardin fruitier.
Mais on voit aussi sur le figure 4 que ces différences de revenu par actif sont minimes pour une même surface (entre 5 et 6 hectares).
La contractualisation avec la sucrerie est donc parfois un moyen d’augmenter ses revenus pour une même surface travaillée, mais souvent, d’autres facteurs influencent le choix du producteur.
Ainsi, il semblerait que souvent le producteur n’ait pas vraiment pu décider de son système de production. En effet, le climat de la région peut parfois nuire aux producteurs, notamment les années de forte sécheresse. Les rendements du maïs, en moyenne de 35 qtx/ha en année normale, peuvent alors chuter jusqu’à 5 qtx. Les vaches n’ayant que les rares pâturages secs et les bas-côtés des routes s’affaiblissent et produisent moins, elles aussi. Une petite exploitation qui jusque-là suffisait à rémunérer les actifs peut alors passer sous le seuil de reproduction. Sans assurance ni accès au crédit, le producteur n’a plus assez d’argent pour continuer l’année suivante, et se voit condamné à louer ou même à vendre sa terre.
C’est là que le contrat avec la sucrerie est intéressant, en tant que stratégie de détresse, puisqu’il sert de garantie au producteur, qui peut alors demander à la banque un prêt lui évitant d’avoir à se séparer de sa terre.
C’est ainsi que quelques-uns des producteurs de la plaine ou sur les flancs du volcan San Cristobal se sont reconvertis à la culture de canne à sucre, en contrat avec la sucrerie.
Pressions de l’agro-industrie sur les petits producteurs
D’autres facteurs vont entraîner la conversion de certains producteurs à la canne, et cette fois directement liés à la présence de l’agro-industrie sucrière dans la zone. Les conséquences négatives de la monoculture de canne pratiquée par la sucrerie ont des répercussions sur les systèmes de production des producteurs de la zone. Ainsi, la baisse de rendement évoquée plus haut, en cas de sécheresse, peut tout aussi bien être due à l’épandage de glyphosate par avion trop près des parcelles, brûlant les productions. De même, l’assèchement des puits du fait de la surexploitation de la nappe phréatique pour irriguer la canne a des conséquences dramatiques sur les petits éleveurs de la plaine, situés loin des cours d’eau et qui, sans leur puits, n’ont plus de quoi faire boire les bovins.
Ces divers systèmes se retrouvent menacés de disparition lorsque les conditions sont trop dures, et c’est alors que beaucoup décident de se convertir à la canne.
Qui résiste aux pressions des agro-capitalistes ?
La partie Nord de la zone d’étude, proche de l’estuaire, se distingue par ses sols humides et la prédominance des cultures de banane plantain. Bien que quelques grandes parcelles de canne y soient visibles, cette partie de la zone est majoritairement couverte de petites exploitations familiales ou patronales axées sur la culture de bananes plantains. D’après les résultats économiques, on peut voir que ces structures sont celles qui dégagent la plus forte valeur ajoutée par unité de surface, derrière les jardins et les vergers, et procurent un revenu par actif important. (cf. figure 5)
En plus de procurer un revenu supérieur à celui des autres exploitations, la culture de plantain réalisée de manière échelonnée permet une rentrée d’argent régulière tout au long de l’année. En outre, la diversification du système de production (plantains, maïs, riz, courges, blé, élevage bovin, élevage porcin, élevage avicole et arbres fruitier) augmente la résilience du système lors d’intempéries.
Il est intéressant de noter que les agriculteurs dont l’exploitation est basée sur la culture de plantain ont tous reçu une importante aide à l’installation d’un projet de coopération internationale du gouvernement américain, la Cuenta reto del milenio (dons de semences, de pompes, de moteurs et d’intrants), et bénéficient d’un marché porteur au Honduras et au Salvador.
Sans aides, un agriculteur de la zone cultivant maïs et haricot ne disposerait probablement pas de suffisamment de fonds pour se reconvertir à la culture de plantain.
Conclusion
Cette étude met en évidence le fait que ces contrats ne suivent pas un modèle « gagnant-gagnant ». Ils permettent en réalité à l’agro-industrie une mutualisation de ses coûts et une diminution de ses risques, tout en accaparant la plus grande partie de la valeur ajoutée créée à partir de la canne fournie par le producteur.
Le monopole dont bénéficie l’entreprise sucrière rend les producteurs impuissants et les oblige à se soumettre aux règles et prix établis par l’entreprise. En signant le contrat, les agriculteurs sont prolétarisés, et perdent toute marge de décision sur leur travail.
Les contrats ont en outre pour objectif une augmentation rapide de la monoculture de canne dans la zone, les producteurs se convertissant les uns après les autres. Les enquêtes de terrain dévoilent que cette conversion n’est pas toujours un réel choix de l’agriculteur, mais se présente souvent comme une stratégie de détresse, soit l’unique solution qu’il ait pour ne pas faire faillite. Les petits producteurs de la zone n’ont en effet aucune aide de la part de l’Etat ni aucun accès au crédit, et sont asphyxiés par l’augmentation des prix des intrants accompagnée de la baisse des prix de vente des produits.
L’exemple de la filière plantain montre ainsi qu’avec un minimum d’aide au départ certains producteurs ont pu investir dans une culture rentable et maintenir leur système de production sans devoir se convertir à la canne. Il est important de noter que ce type d’exploitation obtient de bien meilleurs résultats qu’avec la canne.
Il est donc urgent que les institutions Nicaraguayennes apportent leur soutien aux petites exploitations, plutôt que de privilégier les investissements agro-industriels de grande envergure, pour que celles-ci puissent avoir le choix de leur système de production et ne se retrouvent pas prisonnières d’une multinationale hyperpuissante.
1 Il s’agit en fait d’un contrat entre un producteur et l’agro-industrie sucrière implantée en dehors de la zone d’étude, la Centrale sucrière (Ingenio) San Antonio, mais répondant à une logique très similaire à celle de la zone que nous avons étudiée, d’après les informateurs que nous avons interrogés. Nous n’avons malheureusement pas pu avoir accès aux documents contractuels utilisés par l’Ingenio Monte Rosa.
2 L’annexe présente les modalités de contrat entre une entreprise sucrière et un producteur de canne. Ce contrat nous a permis de compléter les données récoltées sur le terrain.
3 Moyenne pondérée des ventes internes et externes pour les différents produits
4 D’après les observations de terrain